Double désignation pour Séverine Gosselin

Séverine Gosselin s’imaginait boxeuse mais ses parents n’étaient pas de cet avis et la jeune fille dut renoncer à ses rêves de victoires gants aux poings. Si le ring a perdu une combattante, la boxe a récupéré une arbitre de grande valeur. « Quand je suis revenue vers la boxe, j’avais 24 ans, j’étais trop âgée pour commencer une carrière. Le seul moyen d’être sur le ring sans être boxeur, c’est l’arbitrage d’où ma décision de me tourner vers cette fonction » confie S. Gosselin. Une décision devenue une passion pour celle qui déclare avec émotion tout devoir à Manu Lorente, « qui m’a tout appris de cette fonction ».   Séverine Gosselin a hérité  de la rigueur et du perfectionnisme de son mentor pour gravir tous les échelons de l’arbitrage et du jugement jusqu’au plus haut niveau mondial.

Sa présidence à la CNBF (commission nationale de boxe féminine) fut marquée par le doublement des licences femmes, la création et le succès du Ladies Boxing Tour, une compétition  qui a grandement   contribué au rayonnement de la boxe féminine.   Ce poste à la tête de la CNBF,  » c’était un challenge, j’ai du arrêter l’arbitrage AIBA pour  pouvoir le relever mais je ne le regrette pas, ce fut une fantastique aventure humaine « ,  elle l’occupera pendant deux mandatures jusqu’à l’apothéose de Rio et les médailles d’or d’E Mossely et d’argent de S. Ourahmoune. La jeune femme ne court pas après la gloire et les honneurs, « Au cours de son premier mandat, on met en place, lors du second on pérennise, ensuite les motivations s’amenuisent, il faut savoir s’arrêter et passer la main avant qu’une routine improductive ne s’installe ».

La passion et l’instinct la pousse à rejoindre son complice du Ladies Boxing Tour, Mokthar Hadjri l’emblématique entraineur formateur pour devenir présidente du LMX Ring Olympique aux Mureaux. Travaillant en milieu hospitalier en pneumologie, (volontaire en réanimation dans une unité Covid  lors de la première vague), elle confie avoir eu peu de temps pour regarder autre chose au cours d’une année 2020 qui a bouleversé la planète.

Engagée sur la liste de Dominique Nato élu président de la FFB,  Séverine Gosselin vient d’être désignée Vice-Présidente du « R&J Committee AIBA » avant d’être choisie par le comité directeur de la FFB pour occuper le poste, une première pour une femme, de présidente de la CNO (commission nationale des officiels). Séverine Gosselin répond à quelques questions.

BoxeNet: Comment avez-vous été désignée ?

L’AIBA demande à chaque fédération de présenter des gens sur diverses commissions, la FFB m’a sollicitée et a proposé ma candidature. L’AIBA m’a nommée Vice-Présidente de cette commission R&J Committee AIBA  (arbitres et Juges) qui est un peu l’équivalent à l’échelon mondial de notre CNO.

BN: Que signifie cette nomination pour vous?

Cela fait plus de 40 ans que la France n’a pas eu de siège sur cette commission, c’est déjà une immense satisfaction pour nous. Ce n’est pas dans mes habitudes mais pour une fois je vais être fière de moi (rires). C’est un honneur mais cela représente beaucoup de travail, au-delà de ma crédibilité il y a celle de la Fédération Française. Cette commission regroupe plusieurs nations puisque les cinq continents y sont représentés, on procède beaucoup par visio conférence et il y a des missions sur le terrain.

Entourée de Jacques Chinon et René Jacquot

BN: Quels sont les enjeux ?  

Je me rendrai prochainement à Dubaï pour les championnats d’Asie pour observer et analyser le contenu et la façon d’évaluer les juges arbitres, travailler sur des protocoles et voir des points de règlement. Je vais analyser la mise en place des réclamations. Mais en aucun cas, je n’interviendrai sur le déroulement de la compétition, on ne peut pas faire partie d’une commission et être en action, les statuts ne le permettent pas, on sépare les pouvoirs et les influences et tant mieux.

Le poids est énorme parce que les jeux olympiques qui arrivent sont sous la tutelle du CIO et il faut absolument que l’AIBA  réussisse à avoir des jugements transparents avec un maximum de neutralité pour ne pas connaitre les mêmes problèmes qu’à Londres, Pékin et Rio.

BN: Parallèlement vous avez été désignée présidente de la commission nationale des officiels, quel sera votre rôle ?

La CNO regroupe tous les officiels : Les arbitres, juges, délégués, chronométreurs, les présentateurs également. Je me suis présentée sur la liste de Dominique Nato, nous avons les mêmes objectifs. Nous pensons au présent pour rayonner et avoir des bons jugements mais nous pensons aussi à l’avenir par le biais de la formation. En tant que présidente, je prendrai  les responsabilités mais il faudra choisir des experts et des gens compétents pour former une équipe et mener à bien les nombreuses missions de la CNO, que ce soit pour la désignation des officiels, la formation et  la mise à jour des codes sportifs. Il est important que nous soyons en phase avec les fédérations internationales.

BN: Deux désignations importantes pour une femme, une première. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

On parle souvent de sexisme, notre discipline et notre fédération montrent qu’elles ne sont pas si sexistes que cela. Je rappelle que je fus l’une des premières juges arbitres mondiales amateur en France. Etre une femme n’est pas un handicap, elle est l’égale de l’homme en droit et il ne doit pas y avoir de barrières dans le sport ou ailleurs. Il faut relativiser tout cela, on peut ouvrir des instances, des fonctions de juges arbitres, de déléguées, de chronos aux femmes mais cela implique avant tout que les femmes soient compétentes dans ces domaines. Je suis pour la méritocratie avant tout autre critère. Je pense que j’en suis là parce que j’ai travaillé, on m’a nommée pour mon éthique et mes compétences, pas par rapport à mon genre. Vous  savez, en tant qu’arbitre, aucun boxeur, aucun entraineur ne m’a jamais manqué de respect, pas parce que j’étais une femme mais parce que je faisais  mon travail en toute transparence.

Michel BEUVILLE

 

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